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Les techniques d'authentification sont plus redoutables à contourner pour les faux sur toile que pour les faux sur papier. Il est en effet possible de prélever et ensuite d’analyser les pigments d’une œuvre sur toile, en extrayant par exemple un peu de la toile qui dépasse du châssis au dos de l’œuvre. On vérifie ainsi l'adéquation entre les matériaux de l'œuvre et sa date de création présumée. Par conséquent, le faussaire doit utiliser non seulement une toile mais aussi des pigments d’époque pour éviter le risque que représentent les techniques d’authentification. Il lui faut aussi savoir quel type d’huile (de lin, d’œillette, de graine…) l’artiste utilisait pour lier les pigments ensemble. Des compétences de chimie poussées sont donc indispensables pour obtenir pigments et huile.

Par ailleurs, la technique même de la peinture à l’huile rend l’élaboration du faux tableau extrêmement longue. Plusieurs couches de (différentes) couleurs superposées sont nécessaires par exemple pour obtenir des effets de volume. Et une couche doit sécher avant l’application de la suivante pendant un mois et demi à deux mois ! Le faussaire doit aussi avoir suffisamment de talent pour savoir peindre à la « manière » de l'artiste. Une fois réalisée, il faut encore penser à « vieillir » la toile pour que les signes de vieillissement correspondent à la datation du tableau. Cela peut s’effectuer en passant la toile dans des fours et/ou en raclant de la poussière (authentique !) sur de vieilles toiles.

Pour le faussaire, il faut donc que le « gain » escompté soit à la hauteur de l’investissement. Des équipes entières sont parfois montées pour obtenir un seul faux. Les faux ainsi produits peuvent être utilisés par exemple pour être substitués aux originaux dans des musées. Ou bien ils sont écoulés auprès de grands collectionneurs sous le sceau du secret. Saviez-vous que depuis la chute de l’URSS, les faux circulant sur le marché ont beaucoup gagné en qualité ? En effet, les travailleurs des ateliers du KGB dédiés à la fabrication de fausse monnaie/faux papiers pour déstabiliser le Monde Occidental, ont vendu leurs compétences de chimistes et de faussaires à qui voulaient les acheter.


INCIDENCE, Mémo Board: Ceci n'est pas un tableau, argent.

Une autre technique de faux moins complexe consiste à faire passer l’œuvre d’un artiste donné pour celle d’un autre. Il s’agit alors pour le faussaire de repérer un artiste de moins grande facture qui a peint à la même période et de la même façon que celui qui l’intéresse. Cela peut être par exemple le Maître ou les disciples de l’artiste dont il souhaite faire un faux. Le faussaire acquiert les tableaux de l’artiste de moins grande facture et en change la signature pour y faire figurer celle de l’artiste qui l’intéresse. Il attend ensuite un certain nombre d’années pour les revendre ou les revend sur un autre marché, à l’international. Les œuvres de Théodore Gudin (coté aux alentours de 60 000 euros) ont ainsi été utilisées pour faire des faux de Ivan Aïvazovsky (coté aux alentours de 1 à 3 millions d’euros).

Face aux compétences déployées pour élaborer les faux sur toile, il devient très complexe de les repérer mais voici quelques astuces pratiques pour les débusquer :

  • Garder en tête que les faussaires ne font des faux que si la cote de l’artiste est suffisamment élevée (pour que cela soit « rentable »). Seuls certains tableaux sont donc concernés.
  • Accorder une importance particulière à la provenance de l’objet (par qui était-elle détenue, où… ?).
  • Regarder le châssis pour voir s’il correspond à la toile (dimensions exactes, signes de vieillissement).
  • Regarder attentivement la poussière. Elle doit être « cohérente » sur toute la toile.

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